Je me souviens d’une conversation avec un ami scientifique sur les couleurs. Je ne suis pas aujourd’hui capable de vous expliquer comment se créer les couleurs sur le spectre des ondes lumineuses. Non, mais je me rappelle qu’il avait pris l’exemple du ciel et que son bleu naissait d’une certaine fréquence d’ondes mais qu’au final ce bleu aurait pu s’appeler rouge. Ce n’est qu’une question de sémantique.
Je garde toujours cette conversation en tête lorsque je choisis les couleurs pour mes collections. La couleur est un fait de société. L’histoire de la couleur verte est intéressante à ce titre. Avant de devenir la deuxième couleur préférée des Européens, on s’est demandé, à l’antiquité, si les grecs la voyaient puisqu’ils ne la nommaient pas. Parmi les Romains, Néron fut le seul empereur transgressif en aimant le vert.
La couleur verte a longtemps été chimiquement instable, raison pour laquelle elle eut une connotation négative. Ainsi, au Moyen Age, les vertes années étaient celles difficiles de l’adolescence. Au théatre, elle est tabou. Est-ce dû justement à la difficulté des époques de la Renaissance et du Baroque de teindre en vert ? Les costumes étaient alors peints en vert de gris, peinture excessivement corrosive et qui a provoqué quelques accidents pour ceux qui les portaient dans des rôles de cupidité et d’avarice.
Le 20ème siècle voit la revanche du vert et Babar l’éléphant à la fin des années 30 joue un rôle important dans le retour du vert. Si l’école du Bauhaus le rejette comme toutes les couleurs non primaires, le sport le porte à son apogée avec des équipes de football comme Saint Etienne dans les années 70 et la conscience de l’homme des années 2000 en fait le porte-étendart de l’écologie.
Et cependant comme toutes les couleurs le vert est ambivalent. Il est la couleur des femmes enceintes, de la pharmacopée, du paradis dans la religion islamique et tous les destins se jouent sur un tapis vert.
On le voit au travers de cette courte histoire du vert, les hommes ont toujours donné une signification aux couleurs.
Ces significations amusantes collent à mes choix artistiques.
Découvrez ma dernière collection, Sahara, elle est un hommage à mes origines algériennes. C’est pourquoi la couleur camel s’est imposée. Le camel issu de l’ocre est une couleur plus chaude que la couleur chair et plus lumineuse que le marron. Il définit un univers harmonieux. Il attrape la lumière et crée des nuances superbes.
Arrêtez-vous sur la collection Fruit des bois. Elle est inspirée par mes promenades en forêts dans mon enfance. On cueillait les fruits sauvages et on rentrait préparer des tartes ou des confitures. On a tous besoins de ces petits souvenirs ancrés dans la solidité et l’importance des liens familiaux. Le gris symbolise cette solidité et le rose émet les valeurs positives de l’innocence, de la confiance et de la sérénité liés aux moments d’enfance.
Vous connaissez ma première collection homme, Prime. Elle est, et vous souriez, évidemment bleu, puisque pour les hommes, mais réhaussée d’un rouge énergique. Et pourtant le bleu à l’origine était porté par les petites filles, car symbole de fraicheur et de sensibilité, avant de devenir la couleur des garçons. On sait qu’aujourd’hui ces dogmes heureusement explosent. D’ailleurs la collection Prime plaît aussi aux femmes.
Et regardez la collection Vince. Elle poursuit l’audace de la collection Prime. L’orange est la marque de cette audace quand le kaki est celle de la jeunesse, de la beauté et de la vigueur.
Alors soyez curieux des couleurs que vous trouvez dans toutes mes créations. Osez colorer la vie. Jouez avec les mélanges, vivez vos choix et soyez poêtes des couleurs comme Paul Claudel qui a écrit « cette mer si bleue qu’il n’y a que le sang qui soit plus rouge».
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